Les Éditions Au pays d’utopie vous proposent des études intéressantes des traits sexistes et spécistes dans les contes classiques du Petit Chaperon Rouge et du Petit Poucet. Deux contes qui donnent une assise solide à l’exploitation des animaux et à l’assujettissement des femmes, en amenant habilement les enfants à intégrer préjugés et mécanismes discriminatoires dont le bien (mal) fondé ne pourra que douloureusement être remis en cause.
Reconnaissant l’importance des attitudes forgées dans l’enfance, Au pays d’utopie tente de développer une nouvelle littérature pour enfants en modifiant avec tact les contes classiques les plus populaires.
Actuellement 35 contes ont été réécrits dans le souci de proposer des récits qui incitent à prendre en compte les intérêts des animaux plutôt que de présenter ces derniers comme de petites choses existant pour notre amusement et notre fourchette.
Tous ces contes et les études sont réunis sur le site http://avea.net/utopie.
Dans le conte Poutin et Poutot, vous retrouverez un discours condamnant la prédation, qui, même s’il n’a pas l’avantage de pouvoir être entendu, est véritablement porteur d’une certaine vision, pas si utopiste que ça, du monde tel qu’il pourrait être si on se donnait un peu la peine de le changer.
A.
C'était Poutin et Poutot qui faisaient ménage ensemble. Un jour, ils se dirent :
« Nous allons aller aux mûres. »
Or, en cueillant les mûres, Poutot se blessa et son doigt se mit à saigner.
Poutin s'en alla trouver le chien :
« Un chien, un chien !
pour lécher le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
Poutin, répondit le chien, tu n'auras rien, si le chat ne me frotte pas le dos.
Poutin alla trouver le chat :
« Un chat, un chat !
pour frotter le dos du chien,
qui léchera le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
Poutin, dit le chat, tu n'auras rien, si le rat ne me ronge pas les griffes.
Poutin entra chez le rat :
« Un rat, un rat !
pour ronger les griffes du chat,
qui frottera le dos du chien,
qui léchera le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
Poutin, déclara le rat, tu n'auras rien, si la poule ne me donne pas de grain.
Poutin courut trouver la poule :
« Une poule, une poule,
pour donner du grain au rat,
qui rongera les griffes du chat,
qui frottera le dos du chien,
qui léchera le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
Poutin, tu n'auras rien, lui répondit la poule, si le renard ne me réchauffe pas.
Poutin alla trouver le renard :
« Un renard, un renard,
pour réchauffer la poule,
qui donnera du grain au rat,
qui rongera les griffes du chat,
qui frottera le dos du chien,
qui léchera le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
Poutin, tu n'auras rien, répondit le renard, si le loup ne m'invite pas chez lui.
Poutin s'en fut chercher le loup :
« Un loup, un loup,
pour inviter le renard,
qui réchauffera la poule,
qui donnera du grain au rat,
qui rongera les griffes du chat,
qui frottera le dos du chien,
qui léchera le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
Poutin, tu n'auras rien, déclara le loup, si l'homme ne me nourrit pas.
Poutin courut trouver l'homme :
« Un homme, un homme,
pour nourrir le loup,
qui invitera le renard,
qui réchauffera la poule,
qui donnera du grain au rat,
qui rongera les griffes du chat,
qui frottera le dos du chien,
qui léchera le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
Poutin, tu n'auras rien, décida l'homme, si l'agneau ne dort pas avec le loup.
Poutin alla voir l'agneau :
« Un agneau, un agneau,
pour dormir avec le loup,
que l'homme nourrira,
qui invitera le renard,
qui réchauffera la poule,
qui donnera du grain au rat,
qui rongera les griffes du chat,
qui frottera le dos du chien,
qui léchera le doigt de Poutot,
dont le sang coule à flots. »
« Poutin, je suis d'accord », répondit l'agneau, « si l'homme arrête de me manger. »
Alors, l'homme arrêta de manger l'agneau, l'agneau dormit avec le loup, l'homme nourrit le loup, le loup invita le renard, le renard réchauffa la poule, la poule donna du grain au rat, le rat rongea les griffes du chat, le chat frotta le dos du chien et le chien lécha le doigt de Poutot, dont le sang s'arrêta de couler.